19: El Burgo Ranero à Mansilla de Las Mulas

Il n’y a plus une seule mule à Mansilla

DIDIER HEUMANN, ANDREAS PAPASAVVAS

 

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du Camino. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce parcours, voici le lien :

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-el-burgo-ranero-a-mansilla-de-la-mulas-par-le-camino-frances-33903996

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore en Europe de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous pouvez trouver sur Amazon un livre qui traite de ce parcours. Cliquez sur le titre du livre pour ouvrir Amazon.

Le Chemin de Compostelle en Espagne. VIIA. De St Jean-Pied-de-Port à León par le Camino francés

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Encore quelques jours à traverser cette Meseta sans fin. Et aujourd’hui, c’est ici que la Meseta est la plus plate et surtout la plus vaste. Par endroits, votre regard portera jusqu’au montagnes de Cantabrie au Nord, à plus de 50 kilomètres d’ici. Et il en va de même vers le sud, où on a presque envie de découvrir Valladolid, voire Madrid dans le très lointain horizon. En Europe, vous ne trouverez à aucun endroit la vision d’une telle étendue découverte, d’une plaine si infinie. On pourrait parfois se croire voyager dans les grandes plaines d’Amérique.

C’est évidemment encore sans surprise aujourd’hui. C’est encore et toujours, le “Camino real”, qui longe la route le long des marronniers. Une vingtaine de kilomètres de “plaisir programmé”, non ? Allez, ce n’est pas la plus belle étape du Camino francés. Loin de là !

Attention ici aux logements. Ajoutez tous les pèlerins qui sont partis de St Jean-Pied-de-Port et ceux qui se sont ajoutés sur le trajet, et vous pouvez avoir parfois plus de 400 personnes à loger par jour dans ces petits villages. Et si vous considérez le nombre de logements disponibles, il n’y a guère plus de 150 lits disponibles à Mansilla. Réservez.

Difficulté du parcours : Les dénivelés de l’étape (+16 mètres/-95 mètres) ne parlent pas pour de grandes difficultés que vous allez trouver sur le parcours.


Encore et toujours, vous marcherez sur un chemin le long des routes :

  • Goudron : 1.5 km
  • Chemins : 17.4 km

Nous avons fait le parcours jusqu’à León d’une traite, dans un printemps froid et pluvieux. Dès lors, de nombreuses étapes ont été faites sur un sol détrempé, le plus souvent dans la boue collante.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les “vrais dénivelés”, relisez la notice sur le kilométrage sur la page d’accueil.

Voici un exemple de ce que vous trouverez. Il suffit de prendre en compte la couleur pour comprendre ce qu’elle signifie. Les couleurs claires (bleu et vert) indiquent des pentes modestes de moins de 10%. Les couleurs vives (rouge et brun foncé) présentent des pentes abruptes, le brun dépassant 15%. Les pentes les plus sévères, supérieures à 20-25%, très rarement plus, sont marquées de noir.

Section 1 : Aujourd’hui, dans le brouillard de la Meseta.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Ce matin, il y a un brouillard à couper au couteau sur la Meseta. Ce printemps, nous aurons donc connu tous les temps ici, la pluie, le vent, le blizzard, la neige, et maintenant le brouillard. Ici, on devine à peine la Plaza Major d’où part le chemin. Par la route, Mansilla est à 17.6 km d’ici. Par le chemin, ce n’est qu’un kilomètre de plus.
Il y a un petit étang à la sortie du village que l’on devine à peine. Le Camino s’engage aussitôt sur le “Camino real”, le long de la LE-6615.
C’est évidemment sans surprise aujourd’hui. Le Camino, c’est toujours et encore un chemin qui longe une route le long des marronniers. Le brouillard est si dense que l’on ne peut compter les pèlerins sur le chemin ou les cyclistes qui passent sur la route.
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Comment décrire un paysage que l’on ne voit pas ? Si on le voyait, on retrouverait ici toute la panoplie des champs que l’on suit maintenant depuis près de 300 kilomètres, du blé et de l’orge en abondance, avec un peu de maïs et de tournesol. On distingue toutefois des bancs et des cruceros sur le chemin.
C’est toujours aussi plat que la main et parfois les engins articulés d’irrigation sortent du brouillard comme des zombies.
Et les kilomètres défilent, répétitifs, monotones, sans surprise. Ce matin, les pèlerins ne sont plus des points de repère pour mesurer l’avance sur le chemin. On échange parfois un mot ici et là avec eux, pour faire passer le temps et espérer voir se dissiper le brouillard. Quel ennui ! Un rare véhicule passe de temps à autre.

Section 2 : Le Real Camino, toujours moins “royal” mais toujours banalement “vrai”.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Puis, le brouillard se dissipe légèrement. On commence maintenant à distinguer plus nettement des ombres fugitives de pèlerins marchant devant soi.
Plus loin, le chemin descend alors quelque peu vers une plantation de peupliers blancs et noirs. Ici, c’est la première fois que l’on croise des vaches depuis des centaines de kilomètres. Elles paissent sous les arbres, là où coule le petit ruisseau de Valdeasneros.
Après les arbres, ce sont à nouveau les champs. Dans ce pays où la terre et le ciel ne font qu’un, les champs sont immenses. Nous n’avons pas besoin de les voir pour le savoir.
Plus loin, une ruine surgit du brouillard, sépulcrale et fantomatique, comme un gigantesque point d’interrogation.
Les pèlerins ne sont souvent que des ombres chinoises qui glissent furtivement sous les marronniers. Dans la Meseta, il n’y a pas d’oiseaux, ou alors on ne les entend pas.
Peu après, une place de pique-nique sous les arbres, bien dérisoire ce matin. L’Europe a dépensé pas mal d’euros pour humaniser le chemin.
Heureusement qu’il y a de temps à autre un point de repère pour se prouver qu’on avance et non pas qu’on recule. Ici, le chemin traverse le ruisseau d’Utielga. Marcher, se débarrasser de l’obsédante présence des champs sans début ni fin, chasser le brouillard de vos yeux, voilà le délicieux programme.
Nous avons bientôt parcouru près de 8 kilomètres, et nous n’avons pas vu le temps défiler dans un espace qui ressemble à la nuit, quand devant nous stoppe un car près d’une petite route qui traverse perpendiculairement le chemin.
Nous sommes samedi, et le car débarque des touristes espagnols, sans doute locaux, qui viennent tâter du Camino. Ici, dans la région, ils n’ont guère le choix d’aller se balader en montagne. Ils devront donc, comme nous, profiter de l’immensité plate de la Meseta. Autre détail à signaler. Aujourd’hui en Espagne, on renouvelle les autorités. Alors la Guardia Civil fait des aller et retour sur la route. Craignent-ils vraiment une attaque terroriste ? Vous constaterez que la police est présente partout en Espagne quand il y a foule, même dans les marchés.

Section 3 : Entre le canal et la voie de chemin de fer.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Rien ne change vraiment. Parfois, le colza pousse le long des champs. Pourquoi choisit-il toujours de pousser sur les talus, ses graines portées par les vents au bord des champs, alors qu’il n’y a aucun champ de colza près d’ici. Du moins, à première vue !
On voit alors le brouillard se dissiper progressivement lorsque le chemin arrive au canal Bajo de Payuelos, un gigantesque ouvrage d’une trentaine de kilomètres de long, achevé récemment, payé grandement par l’Europe.

Ce canal qui puise son eau dans le Rio Esla, que l’on trouvera à Mansilla, permet d’irriguer plus de 40’000 hectares.

Les sols doivent être relativement imperméables ici, où on récolte aussi l’eau de pluie dans les caniveaux pour des irrigations plus artisanales.
Et le chemin continue sa marche quasi rectiligne le long des marronniers. On entend dans le lointain un train bourdonner et klaxonner à l’envi.
Plus loin, le chemin passe alors sous la voie. Ici, ce n’est plus la ligne TGV. Seuls transitent des trains de marchandises, nombreux dans le pays. Sur les routes, le long du Camino, on ne croise pas souvent de lourds camions. Doit-on conclure que le transport des marchandises s’effectue principalement par le train ? Nous ne saurons le dire, d’autant que l’autoroute ne passe pas loin d’ici.
Après le chemin de fer, le Camino se retrouve dans la petite vallée de Vadearcos…
…où serpente un ruisseau sous les plantations de peupliers.
Peu après, encore une place pique-nique sous les arbres…

… et on retrouve ces champs immenses, dont parfois on ne voit pas l’extrémité, dont parfois on a le sentiment qu’ils couvrent un bon quart de l’Espagne. Et quand on discute un peu avec les pèlerins sur le chemin, un jour chasse l’autre. Est-ce de voir au loin les sommets enneigés de la Cantabrie qui les réjouit ? Hier, ils étaient grognons, ne répondaient guère, les mâchoires serrées, le regard fixe. Aujourd’hui, ils sont presque espiègles, rieurs. Et pourtant, c’est le même paysage, le même chemin, la même route, les mêmes marronniers. Mais voilà ! D’abord l’étape est plus courte, mais on se rapproche à grandes enjambées du bout de la Meseta. Alors, en entrant, ils pourront dire “Nous l’avons faite, la Meseta”. Et les gens ébahis les regarderont bouche bée, car ils ne savent pas ce qu’est la Meseta, ni dans quel pays cela se situe.

Section 4 : On va croiser à nouveau l’autoroute.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Le chemin fait encore près d’un kilomètre sur le plateau dans cette plaine immense où le regard s’affole.

Ici, le crucero est massif, manque d’élégance. A leur habitude, ces croix scandent le parcours.

Plus loin, le chemin descend en pente très douce vers le village de Reliegos. Tout est compact. Dans l’Espagne du Nord, rien n’existe en dehors des villages. Dans la Meseta, la vie ici ne se conçoit que comme collective. Et c’est une vieille histoire. Cela remonte à la période de la Reconquista, quand on s’était rendu compte qu’il était plus facile de se défendre, en étant groupés.
C’est dans ce village pauvre que revient la variante de Calzadilla de los Hemanillos qui s’est séparée du “Camino real” peu après Sahagún. Peu de pèlerins empruntent cette voie, et pourtant c’est une voie romaine, la Via Trajana. Mais une voie romaine peut-elle concurrencer un chemin “real” en Espagne ?
Le nom complet du village est Reliegos de Las Matas. Matas signifie ronces. On les a croisées à foison sur le chemin. Les guides ne disent pas non plus si c’est dans les ronces qu’est tombé le siècle dernier une petite météorite. Dans le village règnent la brique et le pisé. Sincèrement, vous seriez-vous arrêté dans ce bar polyglotte en temps normal ?
L’église a été bricolée de bric et de broc, avec un clocheton.
A la sortie du village, près du court de padel, il y a un petit parc avec un monument récent en hommage à St Jacques.

Sincèrement, on se demande pourquoi les sculpteurs du Camino francés ont presque toujours envisagé de montrer un St Jacques comme un vieillard bedonnant et sévère.

Puis, c’est à nouveau la ligne droite dans une plaine incroyablement immense. C’est plat et les seules aspérités que l’on peut voir sont des bosses artificielles, créées par les hommes. Il est fort à parier que du nord au sud la largeur de la plaine doit avoisiner les 100 kilomètres, comme dans les plaines américaines. Vous ne verrez jamais ailleurs en Europe une telle immensité.
Ici, la lande remplace parfois les cultures. Et une aspérité du terrain, en voici justement une.
Dans une région où aurait pu construire avec aisance 10 aéroports l’un à côté de l’autre, passe, non discrète, l’autovia A-60, l’autoroute qui descend de León vers Valladolid. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on ne se pousse pas au portillon par ici.
Et dans cet univers sans fin, un petit coin de pelouse, avec du bétail en stabulation libre. Le paysan vient ici avec sa 4×4 inspecter ses vaches, ses veaux et ses taureaux. Les taureaux ici font-ils partie de la race élevée pour la tauromachie, que l’on trouve en Castille au sud, près de Salamanca, mais surtout en Andalousie ? Allez savoir !
Et sans surprise encore, le Camino repart de plus belle en ligne droite sur les grands espaces. Mais, en scrutant l’horizon, on voit qu’il se rapproche peu à peu de zones habitées, ou du moins de zones industrielles.

Section 5 : A Mansilla de Las Mulas, il n’y a plus une seule mule.

 


Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Le chemin traverse alors une zone mixte où se mêlent encore les cultures, mais aussi la lande.
Il y a des élevages derrière les grilles, et même une belle décharge.
Le chemin arrive bientôt en vue de Mansilla de Las Mulas, passe sur une route nationale qui sort du bourg.
En dessous coule le canal de la Margen. Encore un de ces grands ouvrages pour l’irrigation des champs.

C’est le premier petit bourg que l’on trouve depuis Sahagún.
Le bourg, comme tous les autres de la région, a vécu un grand développement du temps des romains, quand de nombreuses voies romaines se croisaient dans la Meseta. Puis, au Moyen-âge, la cité protégée par ses remparts dont il reste de nombreuses traces dans le village, près de la rivière Esla, connut un grand essor du temps de l’expansion du chemin de Compostelle. Il reste quelques lambeaux des portes de la cité comme l’Arco de Santa Maria. Ici, on comptait 7 églises, 2 couvents et 4 hôpitaux de pèlerins. Il fallait bien accueillir le million de pèlerins qui se baladait sur le chemin. Mais personne n’a jamais pu confirmer ce chiffre astronomique. Aujourd’hui, le bourg qui a gardé un aspect assez ancien, mais pas médiéval, comme on le prétend dans les guides, compte moins de 2’000 habitants.
Des mules et des mulets, il y en avait ici jadis lorsque la cité était le centre d’une grande foire de bétail. Tout cela a disparu. Le village est assez sympathique avec ses nombreuses places, et ici on voit des gens dans la rue. Le nom de la cité est dérivé de Mano de Silla (main sur la selle). Les armoiries de la ville représentent une main appuyée sur une selle.
Des églises d’autrefois, il ne reste rien. L’église paroissiale Santa Maria, rebâtie sur l’ancien site d’une église du XIIIème siècle est récente, du XVIIIème siècle. Elle est visible au centre du village. Son clocher plaît beaucoup aux cigognes. Mais ce n’est plus une église, c’est l’administration communale. Ce jour-là on votait en Espagne et la Guardial Civil quadrillait le quartier. Nos sondages ponctuels ont donné que dans la région on vote à droite. La Castille était le pays de Franco. Mais, ce jour-là, c’est la gauche qui a renouvelé le pouvoir dans le pays.

Logements



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