18: Terradillos de Los Templarios à El Burgo Ranero

Croyez-vous sincèrement que tout soit “vrai” ici ?

DIDIER HEUMANN, ANDREAS PAPASAVVAS

 

 

Nous avons divisé l’itinéraire en plusieurs sections, pour faciliter la visibilité. Pour chaque tronçon, les cartes donnent l’itinéraire, les pentes trouvées sur l’itinéraire et l’état du Camino. Les itinéraires ont été conçus sur la plateforme “Wikilocs”. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’avoir des cartes détaillées dans votre poche ou votre sac. Si vous avez un téléphone mobile ou une tablette, vous pouvez facilement suivre l’itinéraire en direct.

Pour ce parcours, voici le lien :

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/de-terrasillas-de-los-templarios-a-el-ranero-par-le-camino-frances-36293453

Ce n’est évidemment pas le cas pour tous les pèlerins d’être à l’aise avec la lecture des GPS et des cheminements sur un portable, et il y a encore en Europe de nombreux endroits sans connexion Internet. De ce fait, vous pouvez trouver sur Amazon un livre qui traite de ce parcours. Cliquez sur le titre du livre pour ouvrir Amazon.

Le Chemin de Compostelle en Espagne. VIIA. De St Jean-Pied-de-Port à León par le Camino francés

Si vous ne voulez que consulter les logements de l’étape, allez directement au bas de la page.

Le Camino francés a été déclaré le premier itinéraire européen d’intérêt culturel par le Conseil de l’Europe en 1987, considéré comme patrimoine mondial par l’UNESCO. On l’a déjà dit, mais il est bon de le répéter ici avant d’aborder le “camino real”. L’itinéraire du XIIe siècle, qui deviendra le Camino francés est très marginalement décrit dans le Codex Calixtinus, le Liber Sancti Jacobi conservé à la cathédrale de Santiago. On s’accorde à dater le premier manuscrit vers l’année 1140, avec des adjonctions durant trois siècles. Ce n’est pas le guide Michelin du chemin. Loin de là ! On l’a dit aussi. L’erreur est de faire croire que ce guide du pèlerinage, connu seulement depuis le XXème siècle par une traduction française, était largement diffusé au Moyen Âge, alors qu’il n’en est rien. Ce livre n’est en fait jamais sorti des archives de la cathédrale de Santiago.

Tout cela pour vous dire que le “camino real” est une grande approximation, voire une supercherie. En espagnol “real” signifie “vrai” ou “royal”. Rassurez-vous, il n’y a rien de royal ici, et sans doute rien de tout à fait vrai non plus. Que le chemin passât quelque part par ici, il n’y a que peu de raison d’en douter. Mais à baptiser tout ce cirque de vrai, messieurs les Espagnols, vous exagérez. Mais, les espagnols aiment le tourisme et les pèlerins aiment les histoires. Alors, on a affublé les patelins ici du terme de “vrais”. Tout cela c’est du marketing, comme l’est grandement le chemin de Santiago aujourd’hui.

Ici, dans cette longue traversée de la Meseta, tout est question de votre découpage des étapes et de l’état de vos jambes ou de vos articulations. El Burgo Ranero, c’est à près de 30 kilomètres de Terradillos de Los Templarios. Mais ce n’est pas la mer à boire. C’est de la balade. Le problème ici est de se trouver à se loger, sans faire une course contre la montre. Alors, de nombreux pèlerins profitent souvent de s’arrêter à mi-parcours à Sahagún. Pourquoi pas ? Même le train de la ligne León-Burgos fait halte ici. En fait, Sahagún est une cité avec des monuments plus remarquables les uns que les autres. C’est le berceau du clunisianisme en Espagne, et c’est aussi un des fleurons de l’art mudéjar espagnol. Mudéjar se dit des musulmans restés en Castille après la Reconquista entre le XIème et le XVème siècle. Au niveau de l’art, cela traduit un art d’influence islamique, parfois combiné avec le gothique, qui s’est maintenu ou développé à partir du XIème siècle, dans les provinces reconquises par les chrétiens (Castille, Andalousie et Aragon). L’art mudéjar est un art métis par excellence. Au fur et à mesure de leur avance pour reconquérir les terres occupées par les arabes, les armées chrétiennes permirent à de nombreux maîtres musulmans de rester chez eux et de travailler pour le compte des rois et seigneurs locaux. Le résultat en est un nouveau style architectural, mi-arabe, mi-espagnol. L’Espagne conserve encore de nombreux édifices mudéjars de typologies religieuses et civiles, comme des églises chrétiennes, des synagogues juives, des palais, qui associent des éléments romans et gothiques dans l’agencement de leurs plans à des traits caractéristiques de l’art musulman andalou, tels que les arcs en plein cintre, les frises et les plafonds en bois, et surtout l’emploi de matériaux comme la brique, le plâtre et la céramique au lieu de la pierre. Bien que le mudéjar s’étende sur la quasi-totalité de la géographie espagnole, les trois principaux foyers sont l’Aragon, la Castille-León et la ville de Tolède. Bien que moins influencé par l’art musulman andalou, le mudéjar de Castille-Léon n’en est pas moins spectaculaire. En ce sens, la visite de Sahagún devient incontournable. Il s’agit de l’un des foyers pionniers de cet art, où il est possible d’admirer les églises San Lorenzo et San Tirso.

Difficulté du parcours : Les dénivelés (165 mètres/-167 mètres) sont insignifiants pour une si longue étape. A aucun endroit du parcours, la pente arrive à 10%.


Et tout se passe sur les chemins. Le rêve, quoi ! :

  • Goudron : 3.0 km
  • Chemins : 27.2 km

Nous avons fait le parcours jusqu’à León d’une traite, dans un printemps froid et pluvieux. Dès lors, de nombreuses étapes ont été faites sur un sol détrempé, le plus souvent dans la boue collante.

Il est très difficile de spécifier avec certitude les pentes des itinéraires, quel que soit le système que vous utilisez.

Pour les “vrais dénivelés”, relisez la notice sur le kilométrage sur la page d’accueil.

Voici un exemple de ce que vous trouverez. Il suffit de prendre en compte la couleur pour comprendre ce qu’elle signifie. Les couleurs claires (bleu et vert) indiquent des pentes modestes de moins de 10%. Les couleurs vives (rouge et brun foncé) présentent des pentes abruptes, le brun dépassant 15%. Les pentes les plus sévères, supérieures à 20-25%, très rarement plus, sont marquées de noir.

Section 1 : Retour pour peu de temps en nature.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Ce matin, il fait encore beau sur la Meseta. Apparemment, nous avons laissé le mauvais temps derrière nous. La longue traversée des champs sera d’autant plus agréable. Le Camino quitte rapidement Terradillos de Los Templarios pour se retrouver en pleine nature.
Les champs de blé et les champs en jachère resplendissent encore plus dans la lumière chaude du soleil levant. Au loin se dressent des éoliennes dans ce pays où souffle presque tout le temps le vent, qui vient souvent de l’ouest et se calme un peu par beau temps.
Le soleil doit quand même chauffer ici, non ?
Plus loin, pour quelques courts instants, le Camino va transiter sur le goudron.
Mais, rapidement, le chemin de terre battue reprend ses droits pour trouver le Rio Templarios, que l’on devine à peine sous les peupliers noirs.
Le chemin retrouve alors l’immensité des champs, dans un paysage nettement plus charmant que dans les étapes précédentes.
Apparaît alors le village de Moratinos devant vous, une vingtaine d’habitants à l’année.
Dans tous ces villages, quelle que soit leur taille, il y a toujours les inévitables “albergue” et l’église. Le Camino est un moyen de subsistance fondamental et non négligeable pour ces petits pays. L‘église de Saint-Thomas d’Aquin, fermée a été construite entre les XVIème et XVIIème siècles, en briques.
Après le village, le Camino retrouve aussitôt les champs. Le village est connu pour ses bodegas sur la colline, mais le Camino n’y passe pas.

Section 2 : Le Real Camino, un chemin “royal” ou “vrai” ?

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Dans l’étape du jour, le pays est plus vallonné qu’auparavant, et le chemin s’en va d’une petite colline à l’autre, mais les pentes ne sont guère à plus de 5%.
C’est la première fois depuis notre départ qu’on aperçoit des blés levés. Dans ces régions, de petites différences de degrés de température ou d’altitude peuvent faire la différence.
Dans ce pays où la terre et le ciel ne font qu’un, où la ligne d’horizon est souvent fondue dans l’immensité, on voit parfois quelques ceps de vigne perdus entre les céréales et les champs labourés en attente.
Il est vrai que quand l’ocre de la terre gagne le pays, alors le paysage peut prendre de belles couleurs pastel.
Mais, les couleurs changent à tout instant sur le chemin, quand le soleil se cache derrière les nuages ou éclaire les blés verts ou les terres ocres.
Plus loin, au bout du plateau, un nouveau village pointe un peu en-dessous du chemin, caché par les peupliers noirs.
Le chemin arrive alors à San Nicolás del Real Camino, le dernier village dans la province de Palencia. Dorénavant, nous marcherons en León. Il y a bien sûr l’église, fermée comme souvent.
Vous êtes maintenant sur le “real Camino”. On demande à voir. Ici, à San Nicolás del Real Camino, comme dans tous les villages du chemin, vous croiserez toujours des pèlerins attablés à la pause-café, à l’intérieur ou à l’extérieur, en fonction du temps.
A la sortie du village, le Camino retrouve le Rio Sequillo, d’une très grande discrétion sous les peupliers.
Après le traditionnel hangar pour ranger les tracteurs et les engins agricoles, aujourd’hui de sortie, le Camino s’en va rejoindre la “senda de peregrinos” le long de la N-120. Ici, “senda de peregrinos”, “ruta de de peregrinación”, “camino real” sont tous synonymes et hélas ne font que donner un nom à un chemin qui longe les routes nationales ou départementales.
Ici, les haies se partagent entre genêts, cyprès sauvages et épine vinette. A son habitude dans la région, la N-120 est peu fréquentée, l’autoroute transitant presque parallèle. Et gratuite, le plus souvent, dans le Nord de l’Espagne.
Le Camino suit “la senda de peregrinos” jusqu’à frôler l’autoroute. D’ici vous apercevrez Sahagún en contre-bas, qui vous paraît proche. Ne vous y fiez pas ! Il y a bien près de 5 kilomètres pour y arriver.

Section 3 : Sahagún, c’est assez loin devant vous.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

A la borne, nous quittons la province de Palencia. Ici, le chemin contourne une petite colline de pins sur la terre ocre qui hésite entre le sable et les cailloux…
… puis revient sous la colline au niveau de la N-120. On se dit que lorsque les pèlerins passant ici dans les périodes de canicule, ils doivent s’arrêter un peu par ici.

 

Ces trajets où on a un point fixe et lointain à l’horizon sont une calamité pour le marcheur. On a beau scruter l’horizon, la cité ne se rapproche guère.
Et le chemin continue sa marche en avant le long des peupliers et des petits érables dépouillés sur la “senta de peregrinos”. C’est inéluctable, on va finir par arriver un jour à Sahagún. Apparaît alors le Rio Valderaduey et on vous propose ici de quitter la route pour une allée de peupliers qui se dirige vers un ermitage.
Quand on vous dit que le Camino ne se pratique plus dans l’esprit d’antan. Les pèlerins ont bien vu dans leur guide que le chemin passe dans le bourg. Alors à quoi bon faire un détour de plus pour aller visiter encore une de ces nombreuses chapelles sans doute fermées ? En voulez-vous une preuve ? A ce moment du parcours, il y avait ici près de 20 pèlerins sur le chemin. Seulement deux sont allés jusqu’à la chapelle. Alors, ils filent tout droit le long de la route. Il est fort à parier que par temps de canicule, ils iront sous les arbres à la chapelle. C’est devenu commun. On a de plus en plus le sentiment que les pèlerins sont devenus des touristes qui se dépêchent d’arriver à Santiago, juste pour dire qu’ils ont fait le chemin. Et ils ont grand tort.

Si vous faites le détour une allée mène à la chapelle.

La chapelle est fermée, certes, mais le site est charmant près du vieux pont de pierre qui enjambe la rivière. Le petit pont romain a deux arches. L’ermitage de Notre-Dame du Pont sur le río Valderaduey était à l’origine un hospice de pèlerins et une léproserie, et le chemin vers Sahagún est connu sous le nom de Camino Francés de la Virgen. Le sanctuaire du XIIe siècle a des fondations romanes, mais l’hospice des pèlerins d’origine a disparu depuis longtemps. La chapelle en brique est de style mudéjar.

Un faux portique avec des statues marque le “centre géographique du chemin”, le point médian du parcours entre St Jean-Pied-de-Port et Santiago. On rend hommage ici à Alfonso VI le Brave, du XIIème siècle, roi de León, Castille et Galice, fondateur de Sahagún, protecteur du Camino et de l’Ordre de Cluny. Sa statue, en costume de guerrier, regarde vers Sahagún.

Un large chemin de terre repart alors dans les champs en direction des hangars à machines agricoles qui marquent l’entrée du bourg de Sahagún.
Peu après, le chemin passe sous la N-120 qui contourne le bourg.
L’entrée du bourg est juste après les hangars et la zone industrielle.

Section 4 : En passant par le petit centre de Sahagún.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Le Camino longe la ligne de chemin de fer en entrant dans le bourg. Ici passe la ligne TGV de la Meseta, qui passe près de Burgos et continue sur Pampelune et Barcelone. Pour vous dire que le bourg (2’500 habitants) est assez important, le train fait halte ici.
Après avoir passé la voie de chemin de fer, le Camino entre dans le bourg. La cité, étant anciennement un important carrefour romain, doit son nom à un martyr, Sanctus Facundus, qui devint avec le temps Sant Fagun, puis Safagun, et ensuite par la magie de la transformation de langues Sahagún. Avec tout ce que l’on a entendu sur cette cité que l’on compare à Cluny, on dira que ce n’est pas un enthousiasme délirant qui nous marque. Sur la place se dresse l’église de la Trinidad, un austère monument de briques rouges, qui remonte au XVI-XVIIème siècle. C’est aujourd’hui une gigantesque “albergue” pour pèlerins, l’“albergue Cluny”, aménagée dans la nef, et un auditoire.

Tout à côté se dresse San Juan de Sahagún et sa charmante façade néoclassique de couleur vive, construite sur le lieu de naissance du saint, au XVIIème siècle. Le reste est fait de briques. Ici, pour peu on se croirait en Amérique du Sud. C’est ici que reposent aujourd’hui dans une châsse les reliques de San Facundo et aussi de San Primitivo, un autre saint associé à la ville.

Le Camino descend alors dans les rues étroites de la vieille ville, passe devant un refuge tenu par les sœurs bénédictines.
Les sœurs font leur marché près d’un arc de triomphe. Il y a sans doute de nombreuses bouches à nourrir dans ces lieux où l’hospitalité est la règle.

C’est ici, au niveau de la Grande Porte qu’il faut faire le détour pour aller visiter trois des églises de la ville : le Monastère Royal de San Benito, San Tirso et San Lorenzo. Souvent, les pèlerins ici passent tout droit, du moins les pèlerins qui ne sont pas au courant des merveilles qu’il y a visiter dans la ville.

L’emplacement et le nom actuel de la ville tirent leur origine dans la vénération des habitants pour les saints Facundo et Promitivo, martyrs de leur foi, qui furent jetés ici dans la rivière Cea. On récupéra leurs corps, et on les enterra à une place où on construisit un sanctuaire, qui devint le Monastère Royal de San Benito. Au XIème siècle, c’était devenu l‘abbaye clunisienne la plus importante d’Espagne. C’est sous le règne de Alphonse VI que la cité connut son apogée et son rayonnement immense. Le roi accorda des privilèges à quiconque venait s’installer ici. Le grand roi est enterré dans la cité. L’Arco de San Benito est l’égal d’un arc de triomphe. C’était le portail sud de l’église aujourd’hui disparue du monastère, avec les armes royales et les sculptures des principaux bienfaiteurs de la ville, Alfonso III et Alfonso VI.

Les ruines du monastère de San Benito de Sahagún, dont fait partie la chapelle dédiée à San Mancio, ont été déclarées monument national en 1931. Bien que le monastère ait été fondé vers le IXème siècle, il prit de l’importance sous le règne d’Alphonse VI (1065-1109), qui choisit ici son lieu de sépulture. À la suite de son mariage avec Doña Costanza, fille du duc de Bourgogne, l’esprit de la réforme ecclésiastique commencée à Cluny au Xème siècle, fut introduit en Espagne. Avec l’arrivée de quelques moines clunisiens, Sahagún devint le modèle des monastères hispaniques bénédictins. Plus tard, le monastère passa au XIVème siècle sous le contrôle de la congrégation de Valladolid. Le tremblement de terre de Lisbonne, la Guerre d’Indépendance et deux incendies importants ont été les causes de la grave détérioration subie par le Monastère, qui a finalement été abandonné au XIXème siècle. On le restaure aujourd’hui en partie.
La chapelle de San Mancio est intégrée dans l’ensemble des vestiges du monastère de San Benito de Sahagún. Il s’agit d’une construction romano-mudéjar fondée au milieu du XIIème siècle. La date de consécration de la chapelle et la date de transfert des restes de San Mancio figurent sur une plaque commémorative. Il y a aussi une tour du côté frontispice du Monastère. Avant sa destruction il y avait une autre tour jumelle, dont on peut voir les restes à gauche de celle qui existe, où l’horloge de la Villa a été installée. C’est un grand plaisir de déambuler dans la majesté de ces ruines.
Séparée par une rue de San Benito, l’église de San Tirso fut achevée à la fin du XIIème siècle. Qui est San Tirso ? Ce saint, venu d’Asie mineure, est appelé Thyrse en France. Il mourut en Bourgogne en 250 après Jésus-Christ. Même s’il ne prêcha jamais l’évangile au-delà de la Gaule, son culte est apparu ici, puisque Alphonse VI s’était retrouvé lié à par mariage à la Bourgogne. Et c’est, sous ce roi, que l’ordre de Cluny s’installa dans la cité. L’église de San Tirso est l’édifice le plus représentatif de l’art mudéjar castillan. Depuis 1931, c’est un monument historique et artistique d’intérêt national.

En 1949, la tour s’effondra et on la reconstruisit, en profitant de restaurer l’édifice.

Le bâtiment a une structure de trois absides. L’abside centrale est construite en pierre, avec une bonne maçonnerie en pierres calcaires de taille, jusqu’à une hauteur de près de trois mètres, tandis que toutes les assises supérieures sont en brique, selon les prérogatives du style mudéjar. La tour, rectangulaire et également en brique. Magnifique, elle s’élève sur la partie droite de l’abside centrale et non sur le transept, comme d’usage.

Dépourvu de tout culte religieux, San Tirso est ouvert au public comme un petit musée d’art sacré. Ici, dans les chapelles et les nefs, le visiteur peut contempler une série de pièces d’intérêt archéologique, religieux et historique.

Deux rues plus loin, se dresse une imposante église. C’est San Lorenzo, l’église attachée à la chapelle de Jésus, aujourd’hui le musée de la Semaine Sainte.
L’église de San Lorenzo de Sahagún est un autre magnifique exemple de roman mudéjar. Elle date du début du XIIIème siècle, comme tant d’édifices de ce style. Plus grande encore que San Tirso, sa structure est similaire, mais son matériau de construction est entièrement en brique. L’église possède trois absides avec de beaux arcs en fer à cheval et des frises de briques d’angle. L’énorme tour pyramidale tronquée a quatre sections.

 

L’église est souvent fermée. Nous avons eu cependant le privilège de tomber sur le président de la Confrérie de la Semaine Sainte qui nous a fait la visite. L’église est dépouillée…

…mais les chars des processions sont emprunts de grandeur et de religiosité.
Si vous avez le temps, surtout si vous logez à Sahagún, on ne peut que vous conseiller de vous rendre au Sanctuaire de la Vierge Pèlerine, un peu au-dessus de la ville. Pour le pèlerin qui ne fait que passer, ce sera plus délicat. Il faut une trentaine de minutes pour y aller. Mais, la visite en vaut vraiment la peine. C’est une énorme bâtisse sur la colline. C’est l’église d’un couvent franciscain fondé au XIIIème siècle, qui servait d’hôpital aux pèlerins. Vu de l’extérieur, l’édifice est spacieux et austère, construit en briques.
Le couvent a été abandonné au début du XIXème siècle. Alors, la détérioration du temple fut progressive, rendant sa restauration nécessaire. Seuls l’église et une partie du cloître ont été conservés. Cet ancien couvent franciscain doit son nom à une statue en bois polychrome représentant la Vierge habillée en pèlerine.
Le Sanctuaire du Pèlerin est actuellement siège du Centre de documentation du Camino de Santiago de Sahagún. C’est un musée agencé avec goût et harmonie, sur deux étages.
Tout le monde connaît la Compostela, mais avez-vous déjà entendu parler de la Carta Peregrina ? Sahagún est considéré comme le centre géographique du Camino francés. Ici, on peut obtenir la Carta Peregrina, un certificat de mi-parcours du Camino francés. Chaque année, 10.000 pèlerins en moyenne viennent retirer ce certificat, que l’on peut aussi aujourd’hui trouver aussi à l’Office du Tourisme.
Après cette longue visite de Sahagún, le parcours traverse le Rio Cea sur un vieux pont de pierre
A la périphérie du bourg, il passe dans une longue allée plantée de peupliers noirs et blancs.
Le Camino abandonne petit à petit les arbres pour longer la route qui sort du bourg.
Peu après, il arrive à un carrefour de routes, où il va retrouver la N-120 qui a contourné le bourg.
C’est alors et encore un long pas de deux avec la route nationale. Elle nous colle aux basques. On ne s’en lassera jamais.

Section 5 : On va changer la “senda de peregrinos” pour le “camino real”.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Le ballet devient lancinant, interminable, sous les petits érables qui ne se sont pas encore emplumés.
Plus loin, le chemin croise l’insignifiant ruisseau de la Valle de Calderonas.
Le Camino se rapproche à nouveau à grands pas de l’autoroute, l’autovia del Camino de Santiago. Tiens ! Celle-là nous manquait aussi un peu.
Le chemin arrive bientôt à un nouveau nœud routier près de l’autoroute, Ici, le chemin passe de l’autre côté de la N-120. Pour l’instant elle s’en va vers d’autres horizons. Dommage ! Mais rassurez-vous, vous la retrouverez près d’Astorga.
Alors, nous voici à l’heure d’un choix assez déterminant, l’alternative ou le parcours majoritaire. Les panneaux sur le lieu vous encouragent à suivre le “camino real“, en passant par Bercianos del Real Camino et non l’alternative. Vous verrez bien qu’ici, en majorité les pèlerins dédaigneront la variante. Par conséquent, nous aussi.

Ici on explique l’alternative. Elle traverse l’autoroute, passe à Calzada del Coto, gagne Cazadilla de los Hermanillos, pour rejoindre beaucoup plus loin le chemin traditionnel à Reliegos. Elle ne passe pas à El Ranero. C’est la Via Trajana, un tronçon de voie romaine, en grande partie intact après vingt siècles, construite par l’empereur Trajan pour relier les mines d’or de la province romaine de Galice à Rome. Jadis, les pèlerins passaient par ci. Sur la Calzada Romana, il n’y a pas de routes goudronnées, pas de sendas, pas ou peu de villages, peu d’ombre. La variante, dit-on, suit les chemins de traverse, un vrai désert.

L’autre parcours, le plus emprunté (à plus de 95%) est le “camino real”, le “vrai chemin”, comme le disent les guides. Le “camino real”, c’est bien évidemment moins de fantaisie, le long des routes.

La caractéristique de ce chemin est la présence d’une allée continue de marronniers. Le chemin s’en va donc le long des petits marronniers le long de la route qui mène à Bercianos, parallèle à l’autoroute. Ici nous sommes proches des 800 mètres d’altitude, et en plus des céréales qui commencent à lever dans les champs, on trouve de nombreux champs de maïs. On en n’a encore jamais vus d’aussi conséquents dans la Meseta.
Il y a parfois un banc sur le parcours. Ce n’est pas que le trajet soit pénible pour autant pour justifier leur présence. Mais cela permet aux pèlerins de fermer les yeux un moment, oublier toute cette lancinante monotonie ambiante.
Le long de cette rectiligne où l’horizon se perd, les tracteurs commencent enfin leur ballet, car le sol s’est asséché depuis deux jours. Pour eux aussi, le trajet doit paraître long et monotone, car il leur faudra sans doute plus d’une journée pour labourer le champ jusqu’à la ligne de chemin de fer au loin.
Le chemin est long, très long, trop long avant de trouver la ligne de chemin de fer. 1 kilomètre, peut-être deux kilomètres, quand on aime on ne compte pas. Les marronniers doivent être les bienvenus pour les pèlerins qui passent par ici sous la canicule.
Ici, vous ne verrez pas passer souvent le TGV. Il n’y a guère plus de 4 à 5 passages par jour. Vous verrez plus souvent passer des trains de marchandises sur des voies voisines qui klaxonnent sur le passage. Si, lors de votre voyage retour de Santiago, vous prenez le train et passez par ici, vous remonterez sans doute à la surface des souvenirs enfouis de vos promenades fastidieuses dans ces grandes étendues.

Section 6 : Sur le “camino real”, en passant par Bercianos del Real Camino.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Plus loin, le chemin passe sous la voie de chemin de fer près d’une place de pique-nique…
…et continue sa progression le long de la route vers Bercianos.
Dieu que cela commence à devenir frustrant de décrire des paysages où rien ne se passe, si ce n’est de voir toujours les mêmes marronniers, une route qui n’en finit pas, une ligne de chemin de fer au loin ! Qu’ils sont déjà évanouis les beaux paysages de la Meseta du début. Au début, c’est impressionnant. Puis, on s’habitue. Et à la longue, on se fatigue. Pour notre part, nous avons beaucoup aimé la traversée de la Meseta. Mais, quand c’est trop, c’est trop. Alors, on attend avec impatience le prochain village en imaginant un miracle, que cela va finir par changer.
Plus loin, Bercianos pointe au bout de la ligne droite, mais vous êtes loin d’y arriver.
Juste avant le village de Bercianos se dresse un petit ermitage du XVIIème siècle, consacré à Notre Dame de Pereales. Fermé aussi. On se lasse aussi tout de même de trouver ces lieux inaccessibles. Y-a-t-il autant de déprédations qui forcent à garder les églises closes ? Bientôt peut-être, on n’entrera plus que dans les églises en s’acquittant d’une taxe, comme dans les musées, à des horaires définis. Un crucero sobre se dresse aussi ici, que l’on ne saurait dater.
Il y a aussi ici une place de pique-nique pour faire patienter le client, avant que le chemin ne commence à monter en pente douce vers le village.
Sur le chemin est dressé un arc de triomphe, élevé là dans doute pour laisser passer les grands d’Espagne.
Un peu plus haut, la végétation se fait un peu plus présente sous les peupliers. Le chemin croise le ruisseau d’Espinar, où l’eau coule à un bon niveau. La région alentour est traversée de nombreux canaux d’irrigation.
Dernière ligne droite en légère montée, et le chemin arrive enfin à Bercianos del Real Camino. Sur ces longues étapes, les pèlerins se diluent sur le chemin, et on n’en rencontre plus guère. Aujourd’hui, Il n’y en a que deux à l’“albergue”.
Le Camino traverse alors un village long comme un jour sans pain, mort comme la lune, assoupi peut-être par la sieste, le long de maisons à la simplicité absolue, où la chaleur doit être étouffante en été.
Il y a sans doute des paysans riches dans ces régions, mais ces derniers n’habitent sans doute pas ces maisons de briques, de torchis et de pisé, où le linge sèche sur les façades. Ici, dans ce qui ressemble beaucoup aux pueblos mexicains, doivent habiter les plus pauvres d’entre eux, ceux qui travaillent dans les multinationales de céréales.
A la sortie du village, derrière le petit îlot de peupliers noirs, le “camino real” repart sous les marronniers le long de la route, égal à lui-même. Ici, un habitant est venu voir si le colza qui a atterri dans son pré est bientôt mûr.
Pour les gens qui, comme nous, espéraient une surprise à la sortie du village, c’est râpé. Le “camino real” longe toujours les marronniers au bord des champs grands comme l’Espagne.

Section 7 : La monotonie va bientôt devenir un obsession pour de nombreux pèlerins.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Si vous questionnez les gens, peu d’entre eux vous diront qu’ils apprécient l’uniformité, la monotonie à grande échelle. D’interminables champs que ce soit du blé, du maïs, du soja ou de longues barres d’immeubles, cela n’a forcément rien de très attrayant. Et ici, cela dure depuis bientôt 300 kilomètres. C’est un peu longuet, non ? Les gens vous diront, à coup sûr, qu’ils préfèrent la diversité des forêts, la douceur des collines, car la diversité parle plutôt pour une petite échelle, plus facile et agréable à appréhender pour nos sens. Dans la monotonie des déserts, dans ces environnements où la nature se fait fruste, faite de privations, l’homme se sent petit, vulnérable. Alors, il se torture parfois jusqu’à l’obsession. Combien de temps encore va-t-il supporter de marcher la tête basse, sans plaisir, si ce n’est la satisfaction d’arriver le plus rapidement au bout de l’étape ? Pour beaucoup de pèlerins, la Meseta est une épreuve, semblable au mythe de Sisyphe, qui, à chaque fois qu’il arrivait à rouler son rocher au sommet de la montagne, ce dernier lui échappait, dévalait jusqu’au fond de la vallée et il fallait recommencer.

Mais, de nombreux pèlerins n’arrivent pas à la torture cérébrale généralisée qu’est l’obsession. Il faut être fataliste sur le chemin. Personne ne nous a forcés, comme Sisyphe, à venir ici. Alors, encore un petit tour sur le “camino real”, pavé de bonnes ou de mauvaises intentions, le long des énormes champs qui attendent d’être plantés en maïs. La plante est gourmande en eau et de grands systèmes d’irrigation sont mis en place.

Plus loin, pour changer un peu, le chemin monte en pente douce, mais le paysage reste le même, figé pour l’éternité.
Dans cette immensité où l’horizon se dérobe à perte de vue, se perd entre ciel et terre sans qu’on puisse le définir, les humains au loin ne sont que de petits nains. Parfois le sol change un peu, devient plus gris. Parfois le chemin rectiligne ondule un peu plus sur les minuscules collines.
Les paysans ont sorti leur matériel de guerre. On pressent que le sol va s’assécher et que le travail va bientôt reprendre dans les champs après une grande dizaine de jours de pluie. Parfois encore, les grands engins articulés d’irrigation tendent leur bras vers le ciel comme des pieuvres.
On a de temps à autre érigé des cruceros pour rappeler que le Camino est aussi un chemin de pèlerinage, et tout ce petit monde de pèlerins, à pied ou à vélo, défile inlassablement, sur la ligne droite.
Quand on croise des pèlerins coréens sur le chemin, ceux-ci ont oublié les “Buen Camino” d’enthousiasme du départ. Les pèlerins des autres nationalités aussi. Ils avancent les mâchoires serrées, pressés d’en finir pour aujourd’hui.
Une coquille de Compostelle sur le chemin, souvent cela annonce quelque chose de nouveau. Mais ici rien ne vient perturber la banalité qui se perpétue. Mais, non ! Voici un champ de colza qui pointe, c’est nouveau, presque insolite ici.

Section 8 : Pour aujourd’hui, on siffle la fin.

 

Aperçu général des difficultés du parcours : parcours sans aucune difficulté.

Alors, le chemin longe alors longuement le champ de colza, passant par une zone où la rétention d’eau est plus marquée.
Pourtant, on pressent que quelque chose d’insolite va se passer. On entend au loin bourdonner quelques rares moteurs.
En effet, le chemin se rapproche à nouveau de l’autoroute et de la voie de chemin de fer.
Alors se produit un événement à marquer d’une pierre blanche. Le chemin va passer de l’autre côté de l’autoroute et un peu plus loin de la voie de chemin de fer.
On sent la délivrance proche, car de l’autre côté du tunnel, on aperçoit El Burgo Ranero. Aussitôt, le “camino real” reprend ses droits au bord de la route.
Le chemin arrive bientôt à El Bugo Ranero. Cela ne rassemble pas à un grand village où on passerait ses vacances. Mais, il y a les “albergue” tant attendues.
C’est un village comme les autres, simple, avec sa petite église. Il y a même une Plaza Mayor. Mais, on n’ira pas s’y balader la nuit venue. Ce soir, c’est l’“albergue”, rien que l’“albergue”. Cela argumente fort chez les pèlerins sur leur état d’âme, sur leur impression du parcours. Certains regrettent de ne pas avoir choisi le Camino del Norte plutôt que le Camino francés. D’autres sont plus fatalistes. On leur a promis que depuis León le parcours allait changer.

Logements


N’hésitez pas à ajouter des commentaires. C’est souvent ainsi que l’on monte dans la hiérarchie de Google, et que de plus nombreux pèlerins auront accès au site.
Etape suivante : Etape19:  De  El Burgo Ranero à Mansilla de las Mulas
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